Tamara Landau
L’IMPOSSIBLE NAISSANCE ou l’Enfant Enclavé – phobies et névroses d’angoisseAnnexes du livre
Les documents annexes comprennent toutes les images qui ont fait partie de l’élaboration du livre, y compris celles qui n’ont pu être imprimées.
Annexe page 14
« L’arbre renversé de Christelle »
EXTRAIT
(…) Les patients enclavés sont en proie à un fantasme d’auto-engendrement. Or ce fantasme inconscient, qui suppose un déni des origines et, nous l’avons dit, une inversion de l’image et de la perception du corps propre, perceptible dans les différents lapsus, se matérialise souvent sous la forme d’un arbre renversé, que certaines patientes ont dessiné spontanément dans la cure. (…)
Annexe page 16
« Le cri muet de l’enfant enclavé »
Sculpture en albâtre avec incrustation de coquillage de Tamara Landau
Annexe page 20
« Autoportrait d’Émile »
EXTRAIT
(…) Émile, dix sept ans, est amené par sa mère en thérapie parce que, depuis des années, il refuse de se faire couper les cheveux et de changer de jeans. Après plusieurs années d’analyse, il m’explique qu’il porte deux autres jeans en dessous. Il m’a fallu du temps pour saisir que, loin d’être une parade pour masquer sa maigreur, s’il agissait ainsi, c’est qu’il se percevait hissé en hauteur, un peu comme le « Baron perché » d’Italo Calvino, n’ayant pas conscience du bas du corps. Enveloppé dans les deux jeans, il frôlait les bords du troisième et parvenait ainsi à ressentir ses limites corporelles. Une telle absence de représentation du bas du corps s’accompagne également d’un déni de la différence sexuelle et révèle le fantasme sous-jacent d’être hermaphrodite, d’avoir les deux sexes cachés (vagin, et pénis réfugié dans le vagin). (…)
La pâte à modeler d’Émile nous montre tous les fantasmes de « l’enfant enclavé » : être peu visible, en deux dimensions, sans mains, sans conscience du bas du corps (pratiquement sans poids et sans jambes, il s’appuie au mur pour se tenir debout sur la pointe d’un pied) et sans une identité sexuelle définie.
Nous remarquons également que son visage est couvert par un masque vissé par une clef (en haut à droite).
Annexe page 23
Chorégraphie de Kitsou Dubois en micro-gravité
© Kitsou Dubois Production
EXTRAIT
(…) I. TRANSFERT, ATTENTION FLOTTANTE ET APESANTEUR
Construction du « corps abstrait » et de « l’espace temps » du corps à travers une expérience de danse avec Kitsou Dubois. Danseuse, chorégraphe et chercheur en Arts et Sciences, Kitsou Dubois s’est engagée dans des recherches sur l’application des techniques de la danse à l’entraînement au vol en apesanteur. Dans la lignée de la Nouvelle Danse, elle travaille aussi en relation avec des spécialistes des neurosciences. Ses recherches sur les modalités de l’espace et du temps de la danse dans des environnements aussi variés que l’eau, l’air ou l’apesanteur m’ont été d’une aide précieuse. (…)
Annexe page 37
Dessin de Bérénice, « Le rêve des deux igloos »
Ce dessin représente la permanence du transfert « primordial » dans le temps de la conscience au début de la cure. L’espace fonctionnel de l’enfant (le petit igloo) se trouve encore à l’intérieur de l’espace fonctionnel de la mère (le grand igloo).
Berenice commence, avec la mise en place du transfert, à pouvoir sortir de l’espace fusionnel.
Annexe page 40
Dessin d’Abel, « Lien fusionnel 1 »
Faute de têtes, les actions des deux personnages n’ont ni une origine ni une trajectoire. Il décrit le transfert primordial inconscient, les deux protagonistes ne sont pas du tout intégrés dans le temps de la conscience.
Annexe page 41
Dessin d’Abel, « Lien fusionnel 2 »
Annexe page 60
Claude (1), « Psychanalyse »
Annexe page 61
Claude (2),
« Forme unique de continuité dans l’espace »
Annexe page 61
Claude (3), « Solitude »
Annexe page 64
Malka, « Couple 1 » Schéma fusionnel inconscient
Annexe page 65
Malka, « Couple 2 » Schéma fusionnel préconscient
Annexe page 66
Malka, « Couple 3 » Schème fonctionnel conscient
Annexe page 67
Voledda, « Fusion 2 »
Schéma fusionnel conscient
Annexe page 68
« Anita bébé dans les bras de sa mère »
vue de profil
Annexe page 69
(…) Mais les constatations plus intéressantes dans la compréhension du phénomène d’enclave ont été, d’une part, que les bébés étaient portés de telle façon que leur visage ne pouvait pas être vu par la mère (soit sur le dos, soit collé aux seins, comme Anita, soit, en particulier les filles, sur les hanches). Et, d’autre part, que, souvent, le corps du bébé n’avait ni bras, ni jambes, ni yeux (en d’autres termes, il était représenté sans « vision » d’une image fonctionnelle). (…)
« Anita bébé dans les bras de sa mère »
vue de haut
« Françoise bébé dans les bras de sa mère »
Annexe page 70
EXTRAIT
(…) Pendant le modelage, les patients commentaient leur action ou me rapportaient leur vécu s’ils avaient travaillé chez eux. Je leur demandais, gardant à l’esprit l’expérience avec Malka, de remodeler en séance le couple mère-enfant en restituant une coordination de leurs mouvements et de leurs regards. Pour certains, le modelage a été très profitable, et a eu des effets surprenants sur leurs capacités à se sentir vivants. Nous allons voir ce processus à travers les pâtes à modeler de Nadia. (…)
« Nadia dans les bras de sa mère 1 »
Nadia, comme Anita, nous montre un couple mère-enfant fusionnel, la mère est en deux dimensions, elle ne regarde pas l’enfant, l’enfant est la partie vivante de la dyade, il a d’ailleurs un peu de volume. Je demande à Nadia de refaire une pâte ou la mère et l’enfant existent davantage.
« Nadia dans les bras de sa mère 2 »
Nous voyons que maintenant la mère et Nadia « existent ». Elles occupent l’espace, elles ont un corps qui bouge et elles se regardent mutuellement. Je demande à Nadia de se modeler adulte en train de porter la mère dans ses bras.
Nous voyons que, sans consigne particulière, Nadia modèle sa mère dans ses bras sur sa poitrine, devant elle. Elles se voient dans le temps de la conscience, elles existent toutes les deux et sa mère coordonne ses mouvements avec les siens, pour moins peser. Je demande à Nadia de se modeler côte-à-côte avec sa mère.
« Nadia et sa mère »
Nous remarquons que cette fois-ci, très clairement, Nadia et sa mère sont bien différenciées.
Annexe page 96
« L’arbre renversé de Maeva »
Maeva imagine le lien fusionnel avec sa mère comme un arbre renversé. Elle pense, par conséquent, qu’en coupant les racines de l’arbre elle arrivera à se détacher du corps de sa mère. Christelle, la patiente qui avait dessiné le premier arbre renversé avait imaginé la même chose dans la suite de la cure.
Annexe page 97
« Le portrait de Maeva »
Le portrait de Maeva relie trois générations : de face on aperçoit le visage de la grand-mère, caché par des cheveux, qui nous regarde fixement avec son œil droit et « écoute » avec attention avec une feuille de chêne située au milieu du front, sorte d’oreille primitive commune aux deux autres visages accolés.
Nous voyons en effet deux visages de femmes différents, un plus petit que l’autre, la mère et la fille, qui s’opposent et constituent un seul personnage, à la façon de Janus dans la mythologie.
Les visages de la mère et de la fille sont hissés sur un cou très solide, reliés par des nattes et un collier commun. Leurs cheveux et leurs têtes sont mêlés aux cornes d’un bélier menaçant qui, pour protéger la grand-mère, les enserre très fort et nous scrute.
La mère regarde vers la gauche, vers le passé et la mort, et la fille vers la droite, vers l’avenir et la vie.
Pourtant c’est seulement la mère qui a des petits yeux qui regardent, dans la partie fronto-temporale gauche du cerveau et dans l’environnement autour d’elle, la fille semble dans un état d’hypnose. Le regard de la grand-mère est le seul réellement présent, soutenu par le regard féroce du bélier (regard du surmoi primitif).
Annexe page 98 à 100
Les cinq dessins de Maeva
C’est le masque qu’elle a dû toujours porter, étant détachée de ses émotions.
« Le crâne, parce que je suis en permanence traversée par des idées morbides »
Dessin n°3 « Le Christ en croix »
« C’est le Christ »
On peut observer que le Christ du dessin est une femme.
Dessin n°4 « Le corps caché »« C’est la nuit, la lanterne éclaire un bout de trottoir, et derrière le rideau de fer d’une boutique il y a un cadavre dont le sang coule dans l’égout. Mais une petite flaque reste cachée dans l’ombre. »
J’interprète que nous sommes en train de projeter la lumière qui permettra de retrouver le corps qui a disparu. Le sang qui s’écoule et se perd dans l’égout avait fait disparaître toute trace de son existence. Mais une petite flaque reste intacte dans l’ombre, seule trace de son corps et de sa douleur.
Dessin n°4bis « Détail du rideau de fer »
En agrandissant le rideau de fer, on peut apercevoir, sur la gauche, des jambes d’un homme et d’une femme immobiles, comme des mannequins en bois, et sur la droite, une mare de sang, le cadavre n’étant pas visible.
Dessin n°5 « La coupure »
« C’est une énorme scie qui découpe en deux un bonhomme. Il a une énorme bouche et une oreille à la place du pied. »
Nous voyons ici sa première représentation archaïque de son corps vivant : elle n’est que bouche et oreille. L’oreille est dessinée à la place du pied, perçu inconsciemment comme un organe « d’écoute ».
Annexe page 102
Les trois derniers dessins de Maeva
Dessin n°2 « La pendaison »
il s’agit de ma mère. »
Dessin n°1bis « Détail du miroir »
Dessin n°3 « L’enterrement »
« Je suis en train d’être enterrée. »
Maeva peut cesser d’être complice du meurtre de son corps, qui demeurait enclavé dans celui de sa mère.
Annexe page 143
Frida Kahlo, « L’avortement de Frida », 1932
Frida Kahlo, « L’hôpital Henry Ford », 1932
Nous voyons dans ce tableau Frida allongée sur son lit d’hopital, effondrée, tenant dans la main une bobine du temps la reliant à son bébé suspendu désormais dans un hors-temps, à l’origine de la matière et de l’univers.
« Détail de l’avortement de Frida »
En haut à gauche nous voyons les différentes étapes de la fusion primordiale : deux cellules éponges se séparent par scissiparité. Chaque cellule garde une mâchoire et un œil externe. Dans la seconde division, la séparation de deux yeux internes ne peut pas s’effectuer, ils restent collés (voir flèche).
Annexe page 144
« Ma naissance », Frida Khalo, 1932
Le second tableau, réalisé quelques mois après, s’intitule « Ma naissance ». Il montre Frida Kahlo en train d’accoucher d’elle-même dans un lit conjugal (un espace pour deux) dans une pièce vide. Elle peint « Ma naissance » quelques mois après sa fausse-couche et le décès de sa mère.
Dans ce tableau, en accouchant d’elle-même, elle perd l’image de son visage, caché sous les draps, et maintient l’image de sa mère qui, désormais détachée d’elle, se trouve affichée sur le mur derrière elle, dans son passé. Elle peut naître à elle-même et sortir de l’enclave seulement après la mort de son premier enfant et de sa mère. Ce sentiment, souvent non formulable, est ressenti par nombre de femmes et il s’accompagne toujours d’une grande culpabilité.
Annexe page 151
« L’arbre renversé de Corinne »
Annexe page 156
« Accouchement » ou « Trilogie de la séparation »
Voledda, 1997
(…) Cependant, nous n’avons pas oublié que, durant la dernière phase de la grossesse, le bébé est identifié à sa propre mère et à l’enfant fusionnel qu’elle a été durant sa vie fœtale. En accouchant, la mère laisse donc mourir sa propre mère, en tant qu’objet fusionnel de son identification primordiale, et tue l’enfant fusionnel de sa passion narcissique primordiale et de son désir incestueux. Nous retrouvons ici la signification inconsciente des trois sculptures de Voledda figurant l’accouchement, qui introduisaient la douleur, la mort de la grand-mère et de l’enfant dans les fantasmes originaires. (…)
Annexe page 161
Émile ne peut pas s’imaginer dans les bras de sa mère, il se modèle donc dans les bras de sa grand-mère
Émile arrive à se représenter seulement dans le dos de sa mère : « Je me suis senti toujours comme une bosse ». Émile est resté enclavé dans l’espace fusionnel de sa grand-mère et sa mère (fixation à la troisième phase du Miroir primordial). Il existe symboliquement dans l’espace extra-corporel de la mère, il est d’ailleurs modelé dans une couleur différente, mais il lui reste tellement « collé » que celle-ci peut carrément « voir » et parler à sa place. Émile est resté incapable de se relier à ses émotions, de « voir » avec ses yeux, de bouger et de se sentir exister (comme nous avons vu dans son autoportrait à la page 20)
Annexe page 163
Sarah, contrairement à Émile, « existe » dans un espace extra-corporel séparé de sa mère. Nous voyons dans son modelage que le bébé est décollé du dos de la mère. Mais il est fusionnel, il a d’ailleurs la même couleur que sa mère, et il « voit » et parle à sa place. Cependant, comme Émile, Sarah n’a pas d’image fonctionnelle autonome, n’ayant ni bras ni jambes.
« Sarah bébé dans les bras de sa mère »
la mère vue de face
« Sarah bébé dans les bras de sa mère »
l’enfant et la mère vus de profil
Annexe page 180
Moïse a quatre ans : à travers ces deux dessins, qui ont été les premiers de sa vie, il réalise sa première séparation consciente de l’espace fusionnel.
Dessin n°1 de Moïse
Dessin n°2 de Moïse
Annexe page 251
« L’arbre renversé de Marianne »
C’est une résidence. De la dynamite a détruit des pavillons. Dans l’un d’eux, il y avait mes parents. Le pavillon signé d’une croix, c’est le mien, à l’extérieur de l’enceinte et en sécurité.
Marianne compare la résidence du rêve à celle où elle vit. Le dessin lui rappelle le symbole féminin et la matrice maternelle. L’explosion du pavillon de ses parents la fait associer sur l’idée qu’ils doivent mourir et disparaître pour laisser naître l’enfant. Marianne met en scène la castration primitive (comme Christian auparavant avec ses deux rêves) : l’espace-temps fusionnel s’annihile et elle se retrouve vivante dans l’espace extra-corporel.